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MONSIEUR LE MARQUIS

Lionel pleurait avec elle, et ses larmes le soulageaient ; C’était pour Valérie une consolation que de voir sa douleur ainsi comprise et partagée ; que de voir sa pauvre sœur ainsi regrettée par l’homme qu’elle avait si tendrement aimé.

— Je n’aurais jamais cru, pensait-elle, que mon beau-frère eût tant d’âme… Oh ! comme il est bon ! que je l’aime de pleurer comme il pleure ! Il pleure autant que moi !

Lionel avait un grand charme dans ses sentiments. D’abord il n’avait aucune fausseté : il était simple et naturel ; mais, ainsi que tous les gens passionnés, il était très-mobile dans ses sentiments, et comme ses passions se contredisaient souvent avec une extrême rapidité, on les croyait jouées, parce qu’on ne les avait pas suivies dans leur changement, parce qu’on n’avait pas le secret de leur prompte métamorphose.

Ce jour-là il pleurait sa femme, parce que son imagination était à elle ce jour-là… il la regrettait sans hypocrisie… Un jour plus tard il sera la proie d’une autre image… Il oubliera la peine de la veille ; mais sans légèreté… Son cœur ne se sera point tari, desséché de soi-même… une autre passion l’aura dominé. En lui un sentiment ne s’éteint pas ; il cède à un plus puissant qui le remplace. Dans la solitude, la même idée l’eût fait vivre vingt ans… mais dans la vie compliquée qu’un jour de dépit lui avait faite, il s’était créé une chaîne d’événements qui le jetaient dans des perplexités continuelles, qui l’exposaient à des combats sans cesse renaissants, — une vie de tourments, de remords, d’espérances et de craintes, qui devait tôt ou tard épuiser son cœur ou briser sa raison.


XXX.

DEGRÉS.


Quelques jours se passèrent ainsi dans une douleur véritable. Au bout de ce temps, Lionel, étonné de n’avoir point entendu parler de Laurence après un si cruel événement, demanda si l’on n’était pas venu savoir de ses nouvelles de la part de madame de Pontanges.