même les demi-potages ; mais les bosquets de camélias, jamais ! Il faut nous rendre justice : depuis quelques années le goût de l’horticulture s’est bien répandu en France ; c’est, dit-on, un symptôme de civilisation. Soit : cependant il nous semble que nous ne méritons pas encore d’aimer autant les fleurs.
LETTRE TRENTE-HUITIÈME.
Le grand événement de la semaine est la première représentation de Caligula. Dans l’ordre naturel des feuilletons de la Presse, c’est M. Alexandre Dumas lui-même qui devait rendre compte de cet ouvrage. Ce double rôle de critique et d’auteur lui aurait sans nul doute inspiré un article très-spirituel et fort piquant : mais un sentiment de modestie inexplicable l’a fait se récuser. M. Méry le remplacera ; nous laisserons donc à M. Méry le soin d’analyser le nouveau drame, et d’en proclamer le succès ; nous lui laisserons dire tout ce qui s’est passé sur le théâtre : nous nous bornerons à raconter ce qui se voyait dans la salle. Ah ! la salle nous appartenait, à nous.
Prologue : Car nous aussi, nous avons un petit prologue. La scène se passe dans les vingt salons les plus élégants de Paris. « Irez-vous ce soir, madame, voir la pièce nouvelle ? — Non, vraiment, je n’ai jamais pu avoir de loge. — Vous vous y êtes prise trop tard. — Trop tard ! voilà deux mois que j’ai envoyé au bureau de la Comédie française pour louer une loge, on n’en louait pas ; mon frère y est allé lui-même, il y a quinze jours, il n’a pas été plus heureux que moi. » — Le frère prend la parole : « Je n’ai pu obtenir, dit-il, que cette superbe réponse : Monsieur, la feuille est au secrétariat. — On m’a fait une autre réponse, à moi : M. Dumas avait, dit-on, fait retenir toutes les loges. — Si je pouvais seulement avoir une stalle. — C’est impossible, il n’y en a plus. — Comment, il n’y en a plus ! mais il n’y en a jamais eu, et c’est ce dont je me plains.