Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/115

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Certes, nous ne croyons pas que le peuple de 1795 fût plus avancé en économie politique que le corps électoral de 1847.

Mais alors on posait cette question : Ceux qui mangent de la viande et du pain ou se servent de fer payeront-ils une taxe à ceux qui produisent ces choses ? Et comme les mangeurs de pain étaient en majorité, la majorité disait : Non.

Aujourd’hui on pose la même question. Mais ceux qui font du blé, de la viande ou du fer sont seuls consultés, et ils décident qu’il leur sera payé une gratification, un supplément de prix, une taxe.

Il n’y a rien là qui doive nous surprendre. La Suisse est le seul pays, en Europe, où tout le monde concourt à faire la loi ; c’est aussi le seul pays, en Europe, où des taxes sur le grand nombre en faveur du petit nombre n’ont pu pénétrer.

En Angleterre, la loi était faite exclusivement par les propriétaires du sol. Aussi nulle part on n’avait attribué à la production du blé des primes si exorbitantes.

Aux États-Unis, le parti whig et le parti démocrate se disputent et obtiennent tour à tour l’influence. Aussi le tarif s’élève ou s’abaisse, suivant que le premier l’emporte sur le second ou le second sur le premier.

En présence de ces faits écrasants, quand nous avons soulevé la question du libre-échange, quand nous avons essayé de réagir contre cette prétention d’une classe de faire des lois à son profit, comment est-il arrivé que nous ayons rencontré une opposition ardente et haineuse, parmi les meneurs du parti démocratique ?

C’est ce que nous expliquerons sous peu de manière à être compris.

En attendant, puisse le tableau qui précède, si propre à rendre les hommes du droit commun plus clairvoyants,