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21. — SUR L’EXPORTATION DU NUMÉRAIRE.


11 Décembre 1847.


À l’occasion de la situation financière et commerciale de la Grande-Bretagne, le National s’exprime ainsi :

« La crise a dû être d’autant plus violente, que les produits étrangers, les céréales, ne s’échangeaient pas contre des produits anglais. La balance entre les importations et les exportations était toute au désavantage de la Grande-Bretagne, et la différence se soldait en or. Il y aurait lieu, à cette occasion, d’examiner la part de responsabilité qui revient au libre-échange dans ce résultat ; mais nous nous réservons de le faire plus tard. Contentons-nous de constater aujourd’hui que cette vieillerie qu’on appelle la balance du commerce, si dédaignée, si méprisée, du reste, par certaine école économiste, mérite cependant qu’on y prenne garde ; et la Grande-Bretagne, en comparant ce qu’elle a reçu à ce qu’elle a envoyé depuis un an, doit s’apercevoir que les plus belles théories ne peuvent rien contre ce fait très-simple : quand on achète du blé en Russie, et que la Russie ne prend pas en échange du calicot anglais, il faut payer bel et bien ce blé en argent. Or, le blé consommé, l’argent exporté, que reste-t-il à l’acheteur ? Son calicot, peut-être, c’est-à-dire une valeur dont il ne sait que faire et qui dépérit entre ses mains. »

Nous serions curieux de savoir si le National regarde en effet la balance du commerce comme une vieillerie, ou si cette expression, prise dans un sens ironique, a pour objet de railler une certaine école qui se permet de regarder, en effet, la balance du commerce comme une vieillerie. « La question vaut la peine qu’on y prenne garde, » dit le National. Oui, certes, elle en vaut la peine, et c’est pour cela que nous aurions voulu que cette feuille fût un peu plus explicite.

Il est de fait que chaque négociant, pris isolément, fort attentif à sa propre balance, ne se préoccupe pas le moins du monde de la balance générale du commerce. Or, il est à remarquer que ces deux balances apprécient les choses d’une