Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/171

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au dehors avec de l’argent ou avec des produits. Payer avec de l’argent, c’est diminuer à l’intérieur la masse des ressources disponibles, c’est accroître la difficulté des transactions, paralyser le travail, réduire les salaires, nuire plus ou moins profondément à tous les intérêts. Payer avec des produits, c’est, au contraire, fournir de nouveaux aliments au travail, créer des moyens d’utiliser tous les bras, répandre, avec des salaires durables et abondants, l’aisance et le bien-être dans toutes les classes. Il n’est donc pas vrai que ces deux modes d’échanges se ressemblent, et qu’il n’y ait aucun intérêt pour une nation à suivre celui-ci plutôt que celui-là. Chacun a pu, dans la sphère de ses relations ou de ses affaires, en acquérir la preuve depuis un an. »


Nous sommes d’accord avec la Presse sur le fait que, cette année, « la masse des ressources disponibles à l’intérieur a diminué, que la difficulté des transactions s’est accrue, que le travail a été paralysé, que les salaires ont été réduits, que tous les intérêts ont été plus ou moins profondément lésés. »

Nous ne sommes pas d’accord avec la Presse sur la cause de ce fait. Les calamités qu’elle vient de décrire, la Presse les attribue à ce que nous avons payé le blé étranger avec de l’argent. Nous les attribuons, nous, à ce que le blé a été cher ; et comme il a été cher parce que la récolte a manqué, nous considérons tous les malheurs ultérieurs, la baisse des salaires, la difficulté des transactions, etc., etc., comme les conséquences du déficit de nos récoltes.

Nous disons plus : une fois ce déficit décidé, tous les malheurs qui en sont la suite ont été décidés également. Ces malheurs eussent été bien plus grands encore, s’il ne nous était resté au moins la faculté de faire venir du blé du dehors, même contre notre argent, même contre nos épargnes. Cela est si vrai, que les restrictionnistes les plus renforcés ont acquiescé unanimement à l’ouverture de nos ports. Ils ont bien compris que mieux vaut donner son argent pour avoir du pain, que de manquer de pain et garder son argent. Le déficit de la récolte étant donné, l’exportation du numéraire, loin de causer la crise dont on se plaint,