Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/172

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l’a atténuée. La Presse prend donc le remède pour le mal ; et, pour être conséquente, elle aurait dû demander, cette année plus que jamais, l’expulsion des blés étrangers.

Mais n’aurait-il pas mieux valu payer les blés avec des vins, des eaux-de-vie et des produits de notre industrie ? — Oui, certes, cela aurait mieux valu ; et probablement c’est de cette manière que nous aurions acquitté nos achats, au moins dans une beaucoup plus forte proportion, si la liberté des échanges avait, de temps immémorial, habitué les peuples producteurs de blé à consommer nos produits, et notre industrie à faire ce qui convient à ces peuples. Il n’en est pas ainsi ; chaque pays veut se suffire à lui-même ; et lorsqu’un fléau enlève à l’un d’entre eux les choses les plus nécessaires à la vie, il faut bien, ou qu’il s’en passe, ce qui équivaut à mourir, ou que, pour les obtenir de l’étranger, il lui livre la seule marchandise qui est partout accueillie, l’instrument de l’échange, le numéraire. Mais, encore une fois, le manque de la récolte et le système restrictif étant supposés, l’exportation de l’argent, loin d’être un mal, est un remède ; à moins qu’on ne prétende qu’il vaut mieux mourir d’inanition que de livrer ses écus contre des aliments. (V. le n°20 qui précède.)

La Presse insistera, nous en sommes persuadés, et dira : Reste toujours que la fameuse maxime : Les produits s’échangent contre des produits, est fausse et s’est montrée fausse dans cette circonstance.

Non, elle ne s’est pas montrée fausse. Les écus que nous avons envoyés en Russie étaient eux-mêmes venus du Mexique ; et de même que, pour les avoir des Français, les Russes ont exporté du blé, pour les obtenir des Mexicains nous avions exporté des tissus, des vins et des soieries. En sorte qu’en définitive nous avons échangé des produits contre des produits.

Il aurait mieux valu garder ses écus, dit-on. — Oui, si