Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/279

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consommation. La douane renchérit et les objets de consommation et toutes les matières qui entrent dans la confection du produit. N’est-il pas clair, Messieurs, que la tendance à laquelle je fais ici allusion serait bien plus manifeste si l’octroi frappait la soie, la teinture, les machines, le fer, le coton et la laine ?

Le régime prohibitif ne surcharge pas les prix de revient seulement par les droits et les entraves ; il les grève encore par la masse énorme d’impôts qu’il traîne à sa suite.

D’abord, il paralyse l’action de la douane, en tant qu’instrument fiscal, cela est évident. Quand on prohibe textuellement ou non le drap et le fer, on renonce à tout revenu public de ce côté. Il faut donc tendre les autres cordes de l’impôt, le sel, la poste, etc.

Une ville a mis un droit d’octroi sur l’entrée des légumes, et tire de cet impôt un revenu de 20 000 fr., indispensable à sa bonne administration. Dans cette ville, il y a plusieurs maisons qui jouissent de l’avantage d’avoir des jardins. Le hasard, ou l’imprévoyance des électeurs, fait que les propriétaires de ces maisons forment la majorité du conseil municipal. Que font-ils ? Pour donner de la valeur à leurs jardins, ils prohibent les légumes de la campagne. Je n’examine point ici le point de vue moral ni le côté économique de cette mesure. Je me renferme dans l’effet fiscal. Il est clair comme le jour que la caisse de la ville aura perdu 20 000 fr., quoique les habitants payent leurs légumes plus cher que jamais ; et je prévois que M. le maire, s’il a un grain de sagesse dans la cervelle, viendra dire à son conseil : Messieurs, je ne puis plus administrer. Il faut de toute nécessité, puisque vous repoussez les légumes étrangers, dans l’intérêt, dites-vous, des habitants, frapper ces mêmes habitants d’un impôt de quelque autre espèce.

C’est ainsi que l’exagération de la douane a conduit à des taxes de nouvelle invention.