Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/367

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caractère aux services libres et privés, cherchent à transformer les professions en fonctions.

Ces sectes s’élèvent avec force contre ce qu’elles nomment les intermédiaires. Elles supprimeraient volontiers le capitaliste, le banquier, le spéculateur, l’entrepreneur, le marchand et le négociant, les accusant de s’interposer entre la production et la consommation pour les rançonner toutes deux, sans leur rendre aucune valeur. — Ou plutôt elles voudraient transférer à l’État l’œuvre qu’ils accomplissent, car cette œuvre ne saurait être supprimée.

Le sophisme des socialistes sur ce point consiste à montrer au public ce qu’il paye aux intermédiaires en échange de leurs services, et à lui cacher ce qu’il faudrait payer à l’État. C’est toujours la lutte entre ce qui frappe les yeux et ce qui ne se montre qu’à l’esprit, entre ce qu’on voit et ce qu’on ne voit pas.

Ce fut surtout en 1847 et à l’occasion de la disette que les écoles socialistes cherchèrent et réussirent à populariser leur funeste théorie. Elles savaient bien que la plus absurde propagande a toujours quelques chances auprès des hommes qui souffrent ; malesuada fames.

Donc, à l’aide des grands mots : Exploitation de l’homme par l’homme, spéculation sur la faim, accaparement, elles se mirent à dénigrer le commerce et à jeter un voile sur ses bienfaits.

« Pourquoi, disaient-elles, laisser aux négociants le soin de faire venir des subsistances des États-Unis et de la Crimée ? Pourquoi l’État, les départements, les communes n’organisent-ils pas un service d’approvisionnement et des magasins de réserve ? Ils vendraient au prix de revient, et le peuple, le pauvre peuple serait affranchi du tribut qu’il paye au commerce libre, c’est-à-dire égoïste, individualiste et anarchique. »

Le tribut que le peuple paye au commerce, c’est ce qu’on