Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/316

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On le voit, c’est toujours la même théorie. On suppose que le propriétaire s’interpose entre la bouche qui a faim et l’aliment que Dieu lui avait destiné, sous la condition du travail. Le propriétaire, qui a concouru à la production, se fait payer pour ce travail, ce qui est juste, et il se fait payer une seconde fois pour le travail de la nature, pour l’usage des forces productives, des puissances indestructibles du sol, ce qui est inique.

Cette théorie, développée par les économistes anglais, Mill, Malthus, etc., on la voit avec peine prévaloir aussi sur le continent.


« Quand un franc de semence, dit Scialoja, donne cent francs de blé, cette augmentation de valeur est due, en grande partie, à la terre. »


C’est confondre l’Utilité et la valeur. Autant vaudrait dire : Quand l’eau, qui ne coûtait qu’un sou à dix pas de la source, coûte dix sous à cent pas, cette augmentation de valeur est due en partie à l’intervention de la nature.


Florez Estrada. « La rente est cette partie du produit agricole qui reste après que tous les frais de la production ont été couverts.  »


Donc le propriétaire reçoit quelque chose pour rien.

Les économistes anglais commencent tous par poser ce principe : La valeur vient du travail. Ce n’est donc que par une inconséquence qu’ils attribuent ensuite de la valeur aux puissances du sol.

Les économistes français, en général, voient la valeur dans l’utilité ; mais, confondant l’utilité gratuite avec l’utilité onéreuse, ils ne portent pas à la Propriété de moins rudes coups.


J.-B. Say. « La terre n’est pas le seul agent de la nature qui soit productif ; mais c’est le seul, ou à peu près, que l’homme ait pu s’approprier. L’eau de mer, des rivières, par la faculté qu’elle a de mettre en mouvement nos machines, de nourrir des poissons, de porter nos bateaux,