Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/628

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à la cause, leur caractère providentiel de justice, de châtiment et d’obstacle préventif.

Quand le gouvernement ne peut pas éviter de se charger d’un service qui devrait être du ressort de l’activité privée, il faut du moins qu’il laisse la responsabilité aussi rapprochée que possible de celui à qui naturellement elle incombe.

Ainsi, dans la question des enfants trouvés, le principe étant que le père et la mère doivent élever l’enfant, la loi doit épuiser tous les moyens pour qu’il en soit ainsi. — À défaut des parents, que ce soit la commune ; — à défaut de la commune, le département. Voulez-vous multiplier à l’infini les enfants trouvés ? Déclarez que l’État s’en charge. Ce serait bien pis encore, si la France nourrissait les enfants chinois ou réciproquement…

C’est une chose singulière, en vérité, qu’on veuille faire des lois pour dominer les maux de la responsabilité ! N’apercevra-t-on jamais que ces maux on ne les anéantit pas, on les détourne seulement ? Le résultat est une injustice de plus et une leçon de moins…

Comment veut-on que le monde se perfectionne, si ce n’est à mesure que chacun remplira mieux ses devoirs ? Et chacun ne remplira-t-il pas mieux ses devoirs à mesure qu’il aura plus à souffrir en les violant ? Si l’action sociale avait à s’immiscer dans l’œuvre de la responsabilité, ce devrait être pour en seconder et non en détourner, en concentrer et non en éparpiller au hasard les effets.

On l’a dit : l’opinion est la reine du monde. Assurément pour bien gouverner son empire, il faut qu’elle soit éclairée ; et elle est d’autant plus éclairée que chacun des hommes qui concourent à la former aperçoit mieux la liaison des effets aux causes. Or rien ne fait mieux sentir cet enchaînement que l’expérience, et l’expérience, comme on le sait, est toute personnelle ; elle est le fruit de la responsabilité.