Page:Œuvres d’Éphraïm Mikhaël (Lemerre, 1890).djvu/195

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On fermerait violemment les grilles, et les derniers jeunes hommes de Sirinagor périraient dans la campagne, obscurément.

Ce jour-là, le Mage, quittant le char royal, parla longtemps aux éclaireurs de l’avant-garde. Ils écoutaient respectueusement, la droite appuyée au noyau des hastes. Puis, sur un signal du Mage, ils repartirent au galop. Troublés sans doute par les paroles d’Halyartès, les vieux éclaireurs s’égarèrent. Toute la nuit on chemina dans des plaines stériles et grises, et au matin le cortège se présenta devant la ville du côté où croupissait le Faubourg-des-Mendiants. Les suppliants, brusquement, emplirent les chemins. Il y eut hors des portes une hideuse ruée de foule. Criant, implorant, se défiant et s’injuriant, les mendiants s’élancèrent. Ils se pressaient, se bousculaient ; et l’on voyait se lever dans l’air lumineux des poings maigres et des bâtons. Déjà entre ces mutilés et ces mourants une effroyable et grotesque bataille commençait. Mais le roi se dressa, livide, sur le siège du char. « Non, pas par ici ! Pas par ici ! » criait-il.

Le cortège tourna. Par la route extérieure, le long du rempart, on marcha jusqu’à la porte