Page:Œuvres d’Éphraïm Mikhaël (Lemerre, 1890).djvu/255

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comme une queue de paon fabuleux, son éventail de métal ajouré. Et selon le rhythme des voitures qui passent au loin, dans Paris, les cuivres celés dans les armoires frissonnent et vibrent, et des pendeloques de cristal s’entrechoquent quelque part mystérieusement.

Mais l’employé n’écoute ni le bourdonnement des cuivres captifs, ni le heurt aigrement sonore des cristaux. En vérité, il a bien d’autres soucis. C’est aujourd’hui jour de paie et jour d’échéance. Anxieusement l’employé relit des mémoires ; il fouille dans la caisse ; il suppute péniblement des sommes. Avec les pièces d’or il construit au fond du tiroir de grêles colonnettes. Il fait crier sous ses doigts scrupuleux le papier neuf des billets de banque ; et les billets qui sont jaunis, usés, criblés, pareils à de très vieilles étoffes, il les prend avec des précautions infinies. Pour cette fois encore la maison fera honneur à ses affaires ; mais ce qui restera ce soir après l’échéance, ah ! vraiment, ce ne sera pas lourd. Il songe cela, le bon employé, et il sourit vaguement d’un doux sourire affligé. Cependant l’inexplicable absence des patrons un pareil jour devient inquiétante. Ce matin ils sont partis à sept heures, après le