Page:Œuvres d’Éphraïm Mikhaël (Lemerre, 1890).djvu/99

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Et comme si le vent du soir était plus près
De mon front… Ô senteur nouvelle des forêts !
Naguère j’aspirais en mes divines courses
Je ne sais quels parfums magiques. L’eau des sources
Se changeait sous ma lèvre en céleste liqueur.
Qu’elle est bonne, l’eau des fontaines !… Tout mon cœur
Frémit quand le vent rude effleure mes épaules !
Oh ! je voudrais courir là-bas, parmi les saules.
Mais il est temps. Tu vois que je te vengerai.
Cherchons cet insolent.

Doriette.
Cherchons cet insolent. Ah ! j’aurais préféré

Moins de zèle !

Oriane fait un geste de surprise.

Moins de zèle ! Ne va pas croire que je l’aime,
Ce rôdeur de forêts, harmonieux et blême !
C’est un rêveur, un fou qui cause avec le vent
Et marche dans les fleurs frémissantes, buvant
Les vaines voluptés de la brise estivale.
Puis tu ne serais pas d’ailleurs une rivale.
Certes, s’il t’effleurait de ses désirs humains,
Si sa lèvre insultait la neige de tes mains,
Tu sonnerais du cor et tu te perdrais toute
Dans les brouillards du ciel natal…

Oriane, impatientée.
Dans les brouillards du ciel natal… Eh ! oui, sans doute.