Page:Œuvres de Blaise Pascal, XI.djvu/326

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VI. — Lettre de Madame Perier à Monsieur Vallant (Autographe à la Bibliothèque Nationale, ms. f. fr. 17055, f° 620).

A Clermont, ce 7e Janvier 1675.

Il est bien juste, Monsieur, qu’après avoir pris la liberté de vous recommander Madame Redon, je vous rende grâces des assistances et des consolations qu’elle a receuës de vous, elle m’en a tesmoigné son ressentiment en tant de manières, que je ne sçaurois vous l’exprimer. C’est moy, Monsieur, qui vous en ay la principale obligation, puisque vous l’avez fait à ma considération et à ma prière ; mais je vous en ay tant d’autres qu’en vérité je n’ose pas y penser, parce que je me vois tout à fait hors d’estat et incapable de pouvoir les reconnoistre. J’aurois deu faire ce que je fais aujourd’huy dèz le tems de l’arrivée de Mme Redon, mais l’accident terrible qui m’est arrivé[1] m’avait si fort esbranlé la teste, qu’il a fallu tout ce tems pour la raffermir, je ne vous en dis pas les particularitez. M. de Rebergues vous les pourra faire voir ; on les luy a mandées, il pourra vous dire aussy une partie des horribles embarras où je suis plongée par les affaires[2]. J’avois espéré qu’une année m’en pourroit tirer, mais en voila trois, et il m’en vient tousjours de nouvelles ; je crois que l’un sert d’exemple à l’autre, car tous ceux à qui j’ay affaire me chicannent pour les choses du monde les plus claires et ce qu’il y a de plus affligeant et de plus piquant, c’est que tout cela me vient de la facilité de M. Perier et de l’extresme indulgence qu’il a eue pour tous ceux qui lui devoyent. Enfin, Monsieur, je ne sçaurois vous dire ce que je souffre, mais il faut se soumettre aux ordres de Dieu : ce n’est pas à nous de choisir les

  1. Il s’agit d’un accident de voiture survenu le 3 décembre 1674 ; Marguerite Perier parle de cet accident dans une lettre à Vallant du 9 mars 1676.
  2. Son mari était mort le 23 février 1672.