Page:Œuvres de C. Tillier - I.djvu/323

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— C’est moi, monsieur, qui ai la priorité de l’insulte, je ne vous la céderai pas, et je choisis les échecs.

En même temps il ouvrit la boîte que le sergent avait aussi apportée, et, en ayant tiré un échiquier, il invita le gentilhomme à prendre place à la table.

M. de Pont-Cassé devint blême de colère.

— Est-ce que, par hasard, vous voudriez me mystifier ? s’écria-t-il.

— Point du tout, fit mon oncle ; tout duel est une partie où deux hommes mettent leur vie pour enjeu ; pourquoi cette partie ne se jouerait-elle pas aussi bien aux échecs qu’à l’épée ? Du reste, si vous vous sentez faible aux échecs, je suis prêt à vous jouer cela à l’écarté ou à la triomphe. En cinq points, si vous le voulez, sans revanche ni repentir, cela sera aussitôt fait.

— Je suis venu ici, dit M. de Pont-Cassé, se contenant à peine, non pour jouer ma vie comme une bouteille de bière, mais pour la défendre avec mon épée.

— Je conçois, dit mon oncle ; vous êtes d’une force supérieure à l’épée, et vous espérez avoir bon marché de moi, qui ne tiens jamais la mienne que pour la mettre à mon côté. Est-ce donc là la loyauté d’un gentilhomme ? Si un faucheur vous proposait de se battre avec lui à la faux, ou un batteur en grange avec un fléau, accepteriez-vous, je vous prie ?

— Vous vous battrez à l’épée ! s’écria M. de Pont-Cassé, hors de lui, sinon… ajouta-t-il en levant sa cravache.

— Sinon quoi ? dit mon oncle.

— Sinon je vous coupe la figure avec ma cravache !

— Vous savez comment je réponds à vos menaces, repartit Benjamin. Eh bien ! non, monsieur, ce duel ne s’accomplira pas comme