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SUR LA RÉFORME ÉLECTORALE.

nous serons son maire du palais, nous tiendrons son sceptre et sa bourse, il n’aura plus qu’à payer et nous regarder faire. »

Ô la bonne souveraineté que le peuple a donc conquise là ! Réjouis-toi, peuple, danse des bourrées carrées, donne double ration de pain noir à les enfants, illumine tes chaumières, te voilà souverain ! Heim ! que dis-tu, peuple ? Tu demandes à quoi te servira la souveraineté, si tu ne peux en faire usage, si elle ressemble à ces pièces d’or qu’on donne quelquefois aux enfants, à condition qu’ils ne les dépenseront pas. Comment, peuple, tu ne comprends pas l’avantage d’une telle souveraineté ! Je vois d’où cela vient : c’est que tu n’es pas encore assez éclairé.

Mais, revenons à vous, Monseigneur. Vous dites que le peuple est incapable d’exercer des droits politiques. Je ne relèverai pas maintenant cette insulte ! Mais quand on donne un tuteur à un fou ou à un enfant, on choisit du moins l’homme le plus capable de la famille. Est-ce vous, Monseigneur, qui êtes l’homme le plus capable de la grande famille ? Pour preuve de votre capacité, vous m’apportez des baux de ferme, des actes d’acquisition. Je vois bien que vous êtes riche ; mais capable, je ne le sais pas.

Qu’est-ce, en effet, que votre richesse ? Il y a deux sortes de richesses, la richesse acquise et la richesse héritée. La richesse héritée ne représente rien du tout ; la richesse acquise représente quelquefois la capacité, mais le plus souvent, et surtout par le temps qui court, elle ne représente que l’improbité impunie, l’improbité qui s’est arrêtée là précisément où elle a aperçu le fer ardent du bourreau. Cette richesse, nous la connaissons, nous la rencontrons partout ; elle a de notre sang plein les veines, de notre embonpoint plein les joues. L’argent qu’elle a surpris à l’entrée de nos bourses, qu’elle le garde, qu’elle s’en achète si elle peut une meilleure conscience, nous le lui abandonnons, puisque aussi bien .................... Mais être dépouillés par elle de nos droits de citoyen ;