Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/46

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

effets ? C’est ce que Descartes ne nous apprend pas, c’est ce que l’homme ne saura peut-être jamais bien ; car la géométrie, qui est le plus grand instrument dont on se serve aujourd’hui dans la physique, n’a de prise que sur les objets simples. Aussi Newton, tout grand qu’il étoit, a été obligé de simplifier l’univers pour le calculer. Il a fait mouvoir tous les astres dans des espaces libres : dès lors plus de fluide, plus de résistances, plus de frottements ; les liens qui unissent ensemble toutes les parties du monde ne sont plus que des rapports de gravitation, des êtres purement mathématiques. Il faut en convenir, un tel univers est bien plus aisé à calculer que celui de Descartes, où toute action est fondée sur un mécanisme. Le newtonien, tranquille dans son cabinet, calcule la marche des sphères d’après un seul principe qui agit toujours d’une manière uniforme. Que la main du génie qui préside à l’univers saisisse le géomètre et le transporte tout-à-coup dans le monde de Descartes : Viens, monte, franchis l’intervalle qui te sépare des cieux, approche de Mercure, passe l’orbe de Vénus, laisse Mars derrière toi, viens te placer entre Jupiter et Saturne ; te voilà à quatre-vingt mille diamètres de ton globe. Regarde maintenant : vois-tu ces grands corps qui de loin te paroissent mus d’une manière uniforme ? Vois leurs agitations et leurs balancements, semblables à ceux d’un vais-