Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/64

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que se porte le contre-coup de toutes les sensations ; c’est de là que part le principe des mouvements ; c’est là qu’elle est avertie par des messagers rapides de tout ce qui se passe aux extrémités de son empire ; c’est de là qu’elle distribue ses ordres. Les nerfs sont ses ministres et les exécuteurs de ses volontés. Le cerveau devient comme un sens intérieur qui contient, pour ainsi dire, le résultat de tous les sens du dehors. Là se forme une image de chaque objet. L’âme voit l’objet dans cette image quand il est présent ; et c’est la perception : elle la reproduit d’elle-même quand l’objet est éloigné ; et c’est l’imagination : elle en fait au besoin renaître l’idée, avec la conscience de l’avoir eue ; et c’est la mémoire. À chacune de ces opérations de l’âme correspond une modification particulière dans les fibres du cerveau, ou dans le cours des esprits ; et c’est la chaîne invisible des deux substances. Mais l’âme a deux facultés bien distinctes : elle est à la fois intelligente et sensible. Dans quelques unes de ses fonctions elle exerce et déploie un principe d’activité, elle veut, elle choisit, elle compare ; dans d’autres elle est passive : ce sont des émotions qu’elle éprouve, mais qu’elle ne se donne pas, et qui lui arrivent des objets qui l’environnent. Telle est l’origine des passions, présent utile et funeste. Le philosophe, errant au pied du Vésuve, ou à travers les rochers noircis de l’Islande,