Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/79

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la flamme du bûcher pût être aperçue en même temps de tous les lieux de la Hollande, de la France, de l’Italie et de l’Angleterre. Déjà même il se préparoit à répandre dans toute l’Europe ce récit flétrissant, afin que, chassé des sept provinces, Descartes fût banni du monde entier, et que partout où il arriveroit il se trouvât devancé par sa honte. Mais c’est à l’histoire à entrer dans ces détails ; c’est à elle à marquer d’une ignominie éternelle le front du calomniateur ; c’est à elle à flétrir ces magistrats qui, dupes d’un scélérat, servoient d’instrument à la haine, et combattoient pour l’envie. Et que prétendoient-ils avec leurs flammes et leurs bûchers ? Croyoient-ils dans cet incendie étouffer la voix de la vérité ? croyoient-ils faire disparoître la gloire d’un grand homme ? Il dépend de l’envie et de l’autorité injuste de forger des chaînes et de dresser des échafauds, mais il ne dépend point d’elle d’anéantir la vérité et de tromper la justice des siècles.

Tel est le sort que Descartes éprouva en Hollande. Dans son pays, je le vois presque inconnu, regardé avec indifférence par les uns, attaqué et combattu par les autres, recherché de quelques grands comme un vain spectacle de curiosité, ignoré ou calomnié à la cour (27). Je vois sa famille le traiter avec mépris ; je vois son frère, dont tout le mérite peut-être étoit de partager son nom, parler