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EXAMEN DE L ŒUVRE 95

Pierre de Saint-Amand, et qui l'avait éconduit et traité de mendiant ' ! De là sa rancune pour les uns et sa sympathie pour les autres. Il ne faut pas chercher ailleurs d'autres causes à ses jugements. Pénétré du Roman de la Rose, il se rappelait et avait fait siennes les théories à'Amis du vieil auteur :

Biaus dons si font, n'en doutez mie, Porter tesmoing de bonne vie ; Moult tiennent partout biau les dons, Q.ui biau don donne, il est prudhous ^ !

Aussi doit-on se garder de prendre au pied de la lettre les invectives de Villon, quand on connaît les mobiles qui le font écrire, tout en lui concédant que nombre de ses critiques étaient justifiées, autant — du moins — que nous pouvons en juger par ce que nous savons de ses victimes. Ce qui, peut-être, a permis de voir une portée sociale au Testament c'est que Villon, en vengeant sur les agioteurs, sur les spéculateurs et sur lesusuriers qui foisonnaient alors, ses propres rancunes, se faisait inconsciemment le porte- parole de nombreux lecteurs qui avaient les mêmes griefs contre ces puissants du jour, et qui applaudissaient à cette satire, d'ailleurs assez bénigne, que faisait Villon de l'in- solence et de la grossièreté de ces « nouveaux riches » . Car Villon n'est vraiment violent que pour Tévêque d'Orléans, Thibault d'Auxigu} qui, sans Louis XI, l'eût sans doute laissé pourrir dans un cul de basse-fosse. Pour la plupart des autres, la satire ne dépasse pas le ton de la critique mali- cieuse où il s'attaque plus encore aux travers qu'aux vices des individus.

��1. Tesf., huit, lxxxvii.

2. T. II, p. 190, V. 8274-77.

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