Page:Œuvres de François Villon Thuasne 1923.djvu/115

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une chaleur qui ne lui est pas habituelle et qui sent son polémiste. Il répond, en effet, à un détracteur alors assez en vue, mais qu’il dédaigne de nommer ; bien plus, il ne laisse pas même à supposer qu’il existe, ce qui fait que personne, jusqu’à ce jour, ne paraît s’en être douté.

Ce détracteur était Champollion-Figeac, à ce moment, conservateur des manuscrits de la Bibliothèque royale, lequel, dans l’édition des poésies de Charles d’Orléans qu’il venait de donner au public (1842), écrivait dans sa préface : « L’enjouement, la grâce et la malice brillent surtout dans les chansons et les rondeaux que le prince composa à cette époque, et que les officiers de sa cour tâchèrent d’imiter comme d’excellents modèles. Villon lui-même bien au-dessous du mérite que lui accorde Boileau, d’avoir su

le premier dans ces siècles grossiers
Débrouiller l’art confus de nos vieux romanciers

mérite qui appartient entièrement à Charles d’Orléans, Villon vint essayer de se former à cette époque toute poétique où régnait un goût déjà épuré, un langage riche, nombreux et poli. Comme les autres invités du prince, Villon y composa aussi des ballades et des chansons ; mais les nobles exemples qu’il y trouva ne furent point contagieux pour lui : ses habitudes et ses mœurs restèrent ce qu’elles étaient, ses ouvrages et son style en révèlent trop souvent la mauvaise nature, et nous portent à croire que la chasteté des expressions, la netteté des pensées, le bon esprit et le bon goût étaient encore, en ce temps-là, un des privilèges des grands seigneurs[1]. »

  1. Notice sur Charles d’Orléans, en tête des Poésies (Paris, 1842), p. xviii-xix. De même, Guichard, dans son édition des Poésies de