Page:Œuvres de Robespierre.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Et tandis que tous les ennemis du peuple ont assez d’audace pour se jouer de l’humanité, je manquerai du courage nécessaire pour réclamer ses droits ! Et je garderais devant eux un lâche silence, dans le seul moment où depuis tant de siècles la voix de la vérité ait pu se faire entendre avec énergie, dans le moment où le vice, armé d’un injuste pouvoir, doit apprendre lui-même à trembler devant la justice et la raison triomphantes !… »

Robespierre engage donc vivement ses concitoyens à renverser les prétendus états d’Artois, malgré la prétention de leurs membres d’obtenir de l’Assemblée nationale le maintien de leur constitution ; car c’est pour les peuples un droit imprescriptible et inaliénable de révoquer leurs mandataires infidèles. Puis il se raille de cette autre prétention des états d’Artois de nommer eux-mêmes les députés aux états généraux, auxquels le clergé de la province, faisant échange de compliments avec la noblesse, recommandait comme un devoir de conserver les privilèges d’un ordre gardien du bonheur et de la prospérité du pays. « Ah ! certes, » dit avec raison Robespierre, « il faut que l’habitude du despotisme inspire un mépris bien profond pour les hommes, puisqu’on les croit assez stupides pour entendre, de sang-froid, vanter leur bonheur lorsqu’ils gémissent dans l’oppression et qu’ils commencent à s’indigner de leurs fers ! » Mais, ajoute-t-il, au peuple seul il appartient de choisir ses représentants avec une entière liberté et surtout avec discernement. Qu’il se garde des pièges grossiers que lui tendent certains privilégiés qui, sous le masque du patriotisme, cherchent à capter ses suffrages pour le trahir bientôt. Ce n’est pas sur ceux qui sont intéressés à maintenir les abus qu’il peut compter pour en demander la suppression. Qu’il déjoue donc les intrigues et les menées à l’aide desquelles les membres des états d’Artois osent espérer de lui imposer leurs choix ; c’est de son propre sein qu’il doit tirer les instruments de son salut.