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THÉOLOGICO-POLITIQUE.

leur rétablissement (voyez les vers. 19, 20, 21, 25). Il leur fait connaître que Dieu leur enverra un sauveur qui les délivrera et se révélera à eux, qu’ils l’honoreront par des sacrifices et des présents ; enfin il appelle cette nation le peuple d’Égypte béni de Dieu, toutes choses qui nous paraissent très-dignes d’être remarquées. Enfin Jérémie n’est pas seulement le prophète des Hébreux, mais de toutes les nations (chap. v, vers. 5), parce qu’il déplore et prédit les calamités des nations étrangères, et prédit aussi leur délivrance. Il s’exprime ainsi (chap. xlviii, vers. 31) sur les Moabites : « C’est pourquoi j’élèverai ma voix à cause de Moab, et tout Moab excitera mes clameurs, » etc. ; et : « Mon cœur frémit comme un tambour à cause de Moab. » Puis il prédit le rétablissement des Moabites et celui des Égyptiens, des Ammonites et des Hélamites. Il est donc hors de doute que les autres nations ont eu comme les Juifs leurs prophètes qui ont prophétisé pour elles et pour les Juifs, quoique l’Écriture ne fasse mention que d’un seul, Bilham, à qui fût révélé l’avenir des Juifs et des autres nations. Il ne faudrait pas croire que Bilham n’eût prophétisé qu’en cette occasion que l’Écriture a marquée ; car il résulte du récit même de l’Écriture qu’il s’était distingué bien avant cette époque par le don de prophétie et autres qualités extraordinaires. Quand, en effet, Balak le fit venir, il lui dit (Nombres, chap. xxii, vers. 6) : « Je sais que celui que tu bénis est béni, et que celui que tu maudis est maudit, » Bilham avait donc cette même vertu dont parle la Genèse, et que Dieu avait donnée à Abraham (chap. xii, vers. 3). Il répondit, suivant l’usage des prophètes, aux envoyés de Balak, de rester auprès de lui jusqu’à ce que Dieu lui eût révélé sa volonté. Quand il prophétisait, c’est-à-dire quand il interprétait la volonté de Dieu, voici ce qu’il disait ordinairement de lui-même : « La voix de celui qui entend la parole de Dieu, qui connaît la science (c’est-à-dire l’intelligence ou prescience) du Très-Haut, qui voit face à face le Tout-Puissant, qui tombe à terre, mais qui a les