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TRAITÉ

Testament, les cérémonies sont rattachées à la loi divine. C’est qu’elles étaient fondées sur la révélation, ou du moins sur des bases que la révélation avait posées. Au surplus, comme une bonne raison, si solide qu’elle puisse être, n’a jamais grand effet sur les théologiens, je vais m’attacher à confirmer ici par l’autorité de l’Écriture ce que j’ai établi ailleurs d’une autre façon ; et pour répandre encore plus de clarté sur cette matière, j’expliquerai en quel sens et comment les cérémonies servirent à l’établissement et à la conservation de l’empire hébreu.

S’il y a un point clairement établi dans Isaïe, c’est que la loi divine, prise en elle-même, ne consiste point dans des cérémonies, mais dans cette loi universelle qui nous ordonne de bien vivre. Au chap. Ier, vers. 10, le prophète invite son peuple à apprendre de lui la voie divine, et après en avoir exclu toute espèce de sacrifices et de fêtes, il la leur découvre enfin (vers. 16, 17) et la fait consister tout entière dans la purification de l’âme, dans la pratique de la vertu et l’habitude des bonnes actions, enfin dans la charité pour les misérables. Le témoignage du psalmiste n’est pas moins formel quand il dit en parlant à Dieu (psaume xl, vers. 7, 9) : « Vous n’avez voulu ni sacrifices ni présents ; vous m’avez ouvert les oreilles[1], mais vous ne m’avez demandé ni holocauste, ni oblation pour le péché. Et moi, mon Dieu, j’ai voulu me conformer à votre volonté ; car votre loi est dans mes entrailles. » Ainsi donc le psalmiste n’entend par la loi de Dieu que celle qui est gravée au fond de nos entrailles ; et il en exclut les cérémonies, parce qu’elles ne tirent point leur bonté d’elles-mêmes, mais seulement du fait de leur institution, et n’ont pas par conséquent le caractère d’une loi primitive. Je pourrais citer un grand nombre de passages de l’Écriture pour confirmer cette doctrine ; mais les deux qui précèdent suffisent à mon objet.

  1. C’est-à-dire : vous m’avez donné l’intelligence. (Note de Spinoza.)