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THÉOLOGICO-POLITIQUE.

phylie s'ouvrit, à défaut de tout autre chemin, devant les compagnons du roi de Macédoine, quand Dieu voulut se servir d’Alexandre pour renverser l’empire persan ? Et rien n’est plus certain que cet événement, puisque tous les historiens d’Alexandre s’accordent à le rapporter. Il faut donc que chacun reste libre de penser, touchant les miracles, comme il lui plaira. »

Voilà les propres paroles de Josèphe et son sentiment sur la croyance aux miracles.

CHAPITRE VII

DE L’INTERPRÉTATION DE L’ÉCRITURE

On ne cesse de répéter que l’Écriture sainte est la parole de Dieu, et qu’elle enseigne la véritable béatitude et la voie du salut ; mais au fond on est très-éloigné de penser sérieusement de la sorte, et il n’est rien à quoi songe moins le vulgaire qu’à conformer sa vie aux enseignements de la sainte Écriture. Ce qu’on nous présente comme la parole de Dieu, ce sont le plus souvent d’absurdes chimères, et sous le faux prétexte d’un zèle religieux on ne veut qu’imposer à autrui ses propres sentiments. Oui, je le répète, ç’a été de tout temps le grand objet des théologiens d’extorquer aux livres saints la confirmation de leurs rêveries et de leurs systèmes, afin de les couvrir de l’autorité de Dieu. Pénétrer la pensée de l’Écriture, c’est-à-dire du Saint-Esprit, il n’y a rien là qui excite en eux le moindre scrupule ou qui puisse arrêter leur témérité. S’ils ont une crainte, ce n’est point d’imputer quelque erreur au Saint-Esprit et de s’écarter de la voie du salut ; c’est uniquement d’être convaincus d’erreur par leurs rivaux, et de voir ainsi l’autorité de leur parole affaiblie et méprisée.