Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ments qui sont racontés dans le livre des Juges à partir du chapitre XVII jusqu’à la fin. Tout cela prouve donc bien que les récits historiques de la Bible ne sont pas réglés par une exacte chronologie et que, bien loin de s’accorder entre eux, ils contiennent souvent des choses très-diverses. D’où il faut conclure que ces récits ont été empruntés à des sources différentes, et enregistrés sans critique et sans ordre.

Il n’y a pas moins de désaccord dans la supputation des années entre les Chroniques des rois d’Israël et celles des rois de Juda. Ainsi, il est dit aux Chroniques des rois d’Israël (voyez Rois, liv. II, chap. I, vers. 17) que Jehoram, fils d’Aghab, commença de régner la seconde année du règne de Jehoram, fils de Jehosaphat ; et dans les Chroniques des rois de Juda (voyez ibid., chap. VIII, vers. 16) que Jehoram, fils de Jehosaphat, commença de régner la cinquième année du règne de Jehoram, fils d’Aghab. Que l’on compare les Paralipomènes avec les Rois, on trouvera une foule de discordances semblables, et il n’est point nécessaire d’en faire ici le dénombrement, et moins encore de discuter les suppositions fantastiques des commentateurs qui ont voulu résoudre toutes ces contradictions. Sur ce point, les rabbins tombent dans un vrai délire. D’autres interprètes, que j’ai également lus, ne paraissent pas dans leur bon sens, tant ils corrompent le texte par les inventions les plus chimériques. Par exemple, on trouve, au livre II des Paralipomènes, qu’Aghasia était âgé de quarante-deux ans quand il commença de régner. Or voici les commentateurs qui imaginent de compter ces années, non point à partir de la naissance d’Aghasia, mais depuis le règne d’Homri. Il faudrait donc, pour attribuer une telle pensée à l’auteur des Paralipomènes, supposer qu’il ne savait point dire ce qu’il avait l’intention de dire. Je pourrais citer beaucoup d’autres imaginations de cette espèce, qui n’iraient à rien moins, si elles étaient vraies, qu’à faire croire que les Hébreux ignoraient leur propre langue, que l’ordre des événements était pour