Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome III.djvu/425

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prie de noter l’odieuse assertion qu’on ajoute à celle-là. On soutient que la raison pour laquelle j’oblige les hommes à la pratique de la vertu, ce n’est point l’obéissance aux préceptes et à la loi de Dieu, ni l’espoir d’une récompense ou la crainte d’une punition, mais bien, etc. Assurément, il n’y a rien de semblable dans aucune partie de mon traité ; j’ai déclaré au contraire expressément au chapitre IV De la loi divine (laquelle est inscrite, en effet, de main divine au fond de notre âme, ainsi que je l’ai dit au chapitre II), que toute la substance de cette loi et son précepte fondamental, c’est d’aimer Dieu à titre de souverain bien ; je dis à titre de souverain bien, et non point par crainte de quelque supplice, l’amour ne pouvant naître de la crainte 2, ou par amour pour tout autre objet que Dieu lui-même ; car autrement ce n’est pas tant Dieu que nous aimerions que l’objet final de notre désir. J’ai montré dans ce même chapitre que cette loi divine a été révélée par Dieu aux prophètes ; et maintenant, soit que je prétende qu’elle a reçu de Dieu lui-même la forme d’une législation, soit que je la conçoive comme enveloppant, ainsi que tous les autres décrets de Dieu, une nécessité et une vérité éternelles, elle n’en reste pas moins un décret divin, un enseignement salutaire ; et après tout, que j’aime Dieu librement ou par la nécessité du divin décret, toujours est-il que je l’aime et que je fais mon salut.

Ainsi donc, je crois que je serais autorisé dès ce moment à considérer l’auteur du libelle comme un de ces hommes dont je disais, à la fin de la préface de mon traité, que j’aime mieux qu’ils laissent mon livre entièrement de côté que de le lire pour l’interpréter avec leur perversité ordinaire, incapables qu’ils sont d’en tirer aucune utilité pour eux-mêmes, et ne pouvant que nuire à autrui.

Ces explications suffiraient, je pense, pour l’objet que