Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/127

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la culture des champs fût un rude travail ; le premier, il demanda à l’art leur fécondité, et, excitant les mortels par l’aiguillon de la nécessité, il ne souffrit pas que son empire s’engourdit dans une lâche indolence.

Avant Jupiter, aucun laboureur n’avait dompté les guérets ; on ne pouvait même, par des bornes, en marquer le partage : c’était l’héritage commun ; et la terre produisait tout d’elle-même librement et sans contrainte. Ce fut Jupiter qui arma les serpents de leur noir poison ; qui commanda au loup de vivre de rapines, à la mer de se soulever ; qui dépouilla les feuilles des arbres du miel qu’elles produisaient, et arrêta les ruisseaux de vin qui coulaient en tous lieux. Il voulait que l’expérience avec la réflexion enfantât peu à peu les différents arts, apprit à l’homme à tirer du sillon le froment nourricier, et à faire jaillir des veines du caillou la flamme qu’il recèle.

Alors, pour la première fois, les fleuves sentirent le poids de l’aune habilement creusé ; le pilote compta les étoiles, leur donna des noms, distingua les Pléiades, les Hyades et l’Ourse brillante, fille de Lycaon. Alors on apprit à tendre des piéges aux bêtes sauvages, à tromper l’oiseau avec de la glu, à entourer les forêts d’une meute ardente. L’un jette son épervier dans le fond des fleuves ; l’autre, au milieu des mers, traîne ses filets humi-