Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/232

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bruyantes tempêtes, qui, indignés, frémissent aux portes et font retentir la montagne de leurs sifflements. Assis sur un roc élevé, et le sceptre à la main, Éole modère leur fougue et dompte leur furie. Autrement, entraînés dans leur vol rapide, les mers, la terre et les cieux rouleraient confondus et balayés dans l’espace : mais, craignant ce désordre, le père des dieux enferma les vents dans des antres profonds ; il entassa sur eux de lourdes masses et de hautes montagnes, et leur donna un roi qui, d’après des règles certaines, sût tantôt les retenir et tantôt leur lâcher les rênes.

C’est à lui que Junon suppliante s’adressa en ces termes : « Éole, roi des vents (car c’est à toi que le père des dieux et le maître des hommes a donné le pouvoir d’apaiser les flots et de les soulever), une race qui est mon ennemie navigue sur la mer Tyrrhénienne, portant en Ialie Ilion et ses Pénates vaincus : déchaîne la fureur des vents, brise et submerge ses vaisseaux, ou disperse de toutes paris les Troyens, et couvre de leurs débris la mer irritée. J’ai quatorze nymphes d’une éclatante beauté : la plus belle de toutes, Deiopée, sera ta récompense : unie à toi par un lien indissoluble, elle t’appartiendra ; et pour prix d’un tel service, elle passera toutes ses années avec toi, et te rendra père de beaux enfants. »