Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/310

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tique mère : c’est là que sur toutes les contrées domineront la maison d’Énée, et les fils de ses fils, et ceux qui naîtront d’eux. » Ainsi parle Phébus : soudain éclate une joie vive et tumultueuse. Tous se demandent quels sont ces remparts où le dieu appelle les Troyens errants et leur ordonne de retourner.

Alors mon père, recueillant dans sa mémoire les souvenirs des vieux âges : « Écoutez, chefs des Troyens, et connaissez vos espérances. Au milieu des mers est l’île de Crète, patrie du grand Jupiter. Là s’élève le mont Ida, berceau de notre nation : cent villes puissantes peuplent ce royaume fertile. C’est là, si ma mémoire est fidèle, que notre aïeul Teucer aborda sur les bords de Rhétée, et qu’il jeta les fondements de son empire. Ilion et la citadelle de Pergame ne s’élevaient pas encore. Teucer et les siens habitèrent le fond des vallées. C’est de là que sont venus le culte de Cybèle, l’airain retentissant des Corybantes et le bois sacré du mont Ida, et les mystères silencieux de la déesse, et les lions attelés à son char. Courage donc ! suivons la route où les dieux nous appellent. Rendons-nous les vents favorables, et gagnons le royaume de Gnosse : nous n’en sommes pas éloignés ; et si Jupiter nous seconde, la troisième aurore verra nos vaisseaux aborder aux rives de la Crète. »