Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/406

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l’empire où les destins les appellent, quand la déesse, balançant ses ailes, s’envole dans les airs et trace un arc immense de lumière en fuyant sous la nue. Alors, frappées de ce prodige, et emportées par la fureur, les Troyennes jettent un long cri, enlèvent les feux du foyer sacré, dépouillent les autels ; et le feuillage, les rameaux, les tisons brûlants sont lancés sur les vaisseaux. Abandonné à sa fureur, l’incendie s’étend ; il dévore et les bancs, et les rames, et les poupes ornées de peintures.

Eumèle accourt au tombeau d’Anchise et à l’amphithéâtre annoncer l’embrasement de la flotte ; et déjà les Troyens voient s’élever de noirs tourbillons de fumée et de flamme. Ascagne, qui, rayonnant de joie, conduisait encore son escadron, le premier presse son coursier rapide ; ses gouverneurs alarmés ne peuvent le retenir : il court vers le camp où tout est en désordre. « Quelle fureur étrange ! et quel est, dit-il, votre dessein, ô malheureuses ! Ce n’est point l’ennemi, ce n’est point la flotte des Grecs : ce sont vos espérances que vous brûlez ! Reconnaissez-moi : je suis votre Ascagne ! » Et il jette à ses pieds le casque, désormais inutile, qui couvrait dans les jeux guerriers son jeune front. En même temps, arrive Énée suivi de tous les Troyens. À sa vue, les femmes effrayées fuient et se dispersent le long du