Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/419

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rêter à de tels spectacles ; ils s’agit maintenant d’immoler sept jeunes taureaux indomptés, et un pareil nombre de brebis, choisies selon l’usage. »

Elle dit, et les Troyens s’empressent d’obéir à ses ordres sacrés. Alors la prêtresse les appelle dans son temple. Là est un antre immense creusé dans les vastes flancs du roc Eubéen : cent larges avenues conduisent à cent portes, d’où s’élancent autant de voix, organes de la Sibylle. On était arrivé sur le seuil, quand la vierge s’écria : « Il est temps d’interroger le destin ! le dieu ! voici le dieu ! » Et, tandis qu’elle parle devant les portes sacrées, soudain son visage et la couleur de son teint ne sont plus les mêmes ; ses cheveux en désordre se hérissent, son sein haletant se soulève, la fureur transporte ses farouches esprits ; sa taille semble grandir, et sa voix n’a plus rien de mortel, quand, de plus près, le dieu l’échauffe de son souffle puissant : « Tu tardes, Énée, dans tes vœux et dans tes prières, dit-elle ; tu tardes ! et ce n’est qu’à leur suite cependant que les portes de ce temple redoutable s’ouvriront. » Elle dit, et se tait. Une terreur glacée court dans les os des Troyens, et, du fond de son cœur, leur roi adresse au dieu cette prière :

« Apollon, toi qui compatis toujours aux déplorables malheurs de Troie ; qui dirigeas contre le corps du petit-fils d’Éaque la