Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/425

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frapper ; Misène, fils d’Éole, que nul ne surpassa dans l’art d’enflammer les guerriers et d’exciter l’ardeur des combats par les sons de l’airain belliqueux. Il avait été le compagnon du grand Hector ; il le suivait dans la mêlée, également habile à manier le clairon et la lance. Lorsque le fils de Priam fut tombé sous le glaive d’Achille, le vaillant Misène, par un choix non moins glorieux, suivit la fortune d’Énée. Mais, tandis qu’il fait retentir les flots du bruit de sa conque sonore, et qu’il ose, l’insensé ! défier au combat les dieux de la mer, Triton, jaloux, le croirait-on ? le saisit et le précipite, entre les rocs, sous la vague écumante. Les Troyens, et surtout le pieux Énée, réunis autour de son corps, gémissaient et poussaient de grands cris. Aussitôt ils s’empressent, en pleurant, d’exécuter les ordres de la Sibylle, d’entasser des arbres et d’élever vers les cieux l’autel funéraire. On va dans une antique forêt, retraite profonde des bêtes sauvages : les pins ébranlés tombent, l’yeuse et le frêne retentissent sous les coups de la hache, le coin acéré s’enfonce dans le tronc des chênes, et des ormes immenses roulent du sommet des montagnes. Énée prend part, le premier, à ces travaux ; il exhorte ses compagnons, et s’arme des mêmes instruments. Mais, à l’aspect de cette forêt immense, de graves pensers agitent son cœur affligé, et sa voix