Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/434

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saient les pointes d’un rocher, lorsqu’un peuple barbare se jeta sur moi, le fer à la main, dans l’espoir trompeur d’une riche dépouille : et maintenant mon corps est le jouet des flots, et les vents le roulent vers le rivage. Mais vous, héros invincible, je vous en conjure par la douce lumière des cieux dont vous jouissez, par l’air que vous respirez, par les mânes de votre père, et par l’espoir naissant du jeune Iule, mettez un terme à mes maux. Jetez sur mon corps un peu de terre, vous le pouvez : vous le trouverez au port de Vélie. Ou, s’il est ici un chemin pour vous, et s’il vous est ouvert par la déesse, votre mère (car, je le crois, ce n’est pas sans l’appui des dieux que vous vous préparez à franchir le marais stygien et ces fleuves immenses), tendez la main à un malheureux : entraînez-moi avec vous au delà de ces ondes, afin qu’au moins, étant sorti de la vie, je repose dans une tranquille demeure. » À ces mots, la Sibylle l’interrompant : « D’où te vient, dit-elle, ô Palinure ! ce désir insensé ? Quoi ! sans être inhumé, tu franchirais les ondes stygiennes et le fleuve redoutable des Euménides ! et, sans le consentement des dieux, tu passerais l’autre rive ? Cesse d’espérer que tes prières puissent fléchir le Destin. Mais, écoute, et retiens ces paroles qui pourront consoler ton malheur : effrayés par des signes célestes, les peuples des villes voisines viendront de toutes parts recueillir tes restes, et