Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/438

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une forêt de myrtes. Les soucis les suivent jusque dans la mort. En ce lieu, Énée aperçoit Phèdre, Procris et la triste Ériphyle, montrant la blessure qu’elle reçut d’un fils cruel ; avec elles il voit Évadné, Pasiphaé, Laodamie, et Cénis, jeune homme autrefois, femme maintenant, et rendu encore par le Destin à sa forme première.

Parmi ces ombres, dans cette vaste forêt, errait Didon, dont la blessure saigne encore. Dès que le héros troyen est près d’elle, et qu’il l’a reconnue à travers l’ombre obscure, comme on voit ou l’on croit voir la lune, en son premier croissant, poindre dans des nuages sombres, il verse des larmes et lui adresse ces paroles avec une douce tendresse :

« Infortunée Didon ! Il était donc vrai que vous ne viviez plus, et que vous aviez, par le fer, mis fin à vos jours ! Hélas ! c’est moi qui fus cause de votre mort. Mais, j’en prends à témoin les astres et les dieux du ciel, et tout ce qui rend le serment sacré dans ces lieux souterrains, c’est malgré moi, ô reine ! que je quittai vos rivages. Ces mêmes dieux, qui me forcent aujourd’hui de descendre dans ce sombre royaume, dans cette nuit horrible et profonde, m’avaient donné cet ordre cruel. Non, je n’ai pu croire que mon départ pût vous causer tant de douleur. Arrêtez, et ne vous dérobez