Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/487

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son cours tortueux, brise sur les rochers son onde retentissante. Là s’ouvre une caverne horrible, soupirail du noir empire de Pluton, vaste gouffre d’où l’Achéron débordé exhale d’impures vapeurs ; l’odieuse Érinnys se plonge dans cet abîme, et délivre de sa présence la terre et le ciel.

Cependant la fille de Saturne achève de mettre la dernière main à cette guerre. Du champ de bataille la foule des pasteurs se précipite dans la ville. Ils rapportent le corps du jeune Almon et le cadavre défiguré de Galésus ; ils implorent les dieux, et ils conjurent Latinus. Turnus paraît, et, dans le tumulte des reproches adressés aux Troyens, sa voix redouble la terreur. Il se plaint qu’on appelle au trône les fils de Teucer, qu’on s’allie à des Phrygiens, et que lui, on le chasse !

En même temps, tandis qu’en proie aux fureurs de Bacchus, et excitées par le nom puissant d’Amate, les mères bondissent dans les hautes forêts, leurs fils se rassemblent de toutes parts, et de leurs cris fatiguent le dieu des combats. Égarés par une divinité contraire, tous au mépris des auspices, au mépris des oracles des cieux, demandent à l’instant cette guerre fatale. La foule se presse autour du palais. Le roi résiste inflexible à leurs clameurs, comme un rocher reste immobile au sein des mers, quand, dans