Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/526

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les maux. Mais, ô Fortune ! si tu me menaces d’un coup fatal, que maintenant, oui, maintenant, ma triste vie s’achève, tandis que le doute est mêlé à la crainte, et que l’avenir me laisse un espoir incertain ; tandis que je te tiens encore dans cet embrassement, ô mon fils, mon dernier et mon seul bonheur ! que je meure avant qu’un message funeste ne vienne blesser mes oreilles ! » Ainsi dans ce suprême adieu s’épanche la douleur de ce père affligé. Il s’évanouit, et ses serviteurs l’emportent dans sa demeure.

Déjà l’escadron est sorti des portes de Pallantée. Énée et le fidèle Achate s’avancent les premiers : ils sont suivis des autres chefs troyens. Au centre, Pallas se distingue par sa chlamyde et par l’éclat de ses armes : tel, humide encore des eaux de l’Océan, Lucifer, de tous les astres le plus cher à Vénus, lève dans le ciel son front sacré et dissipe les ténèbres. Les mères tremblantes, debout sur les remparts, suivent des yeux, à travers un nuage de poussière, la troupe resplendissante d’airain. Par le plus court chemin, ils marchent à travers les buissons : un cri part, les rangs se forment, et, d’un pied retentissant, les chevaux, en cadence, battent les champs poudreux à pas précipités.

Près du fleuve qui baigne de ses fraîches ondes les murs de Céré, est un vaste bois au loin consacré par la piété de nos pères, et que de hautes collines, couronnées de noirs sapins, enferment