Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/594

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veut qu’ils succombent sous les coups d’un ennemi plus redoutable.

Cependant la sœur de Turnus court avertir son frère de secourir Lausus : Turnus, sur son char rapide, s’élance dans la mêlée, et, à peine au milieu de ses compagnons : « Arrêtez, dit-il, arrêtez ; c’est à moi seul de marcher contre Pallas ; c’est à moi seul que Pallas est dû : je voudrais que son père fût là, témoin du combat ! » Il dit, et les Rutules, dociles à ses ordres, lui laissent le champ libre. Surpris de ce ton superbe et de la prompte obéissance des Rutules, Pallas contemple Turnus avec étonnement : il porte et reporte les yeux sur sa taille gigantesque, et le parcourt tout entier d’un regard farouche ; puis il repousse par ces mots les arrogantes paroles de son ennemi : « Ou tes riches dépouilles, dont je vais m’emparer, ou une mort illustre feront ma gloire : l’un et l’autre sort est égal aux yeux de mon père ; cesse tes menaces. » Il dit, et s’avance dans l’espace ouvert aux combattants. La crainte a glacé le cœur des Arcadiens. Turnus s’élance de son char : c’est à pied et de près qu’il veut combattre Pallas. Tel un lion, apercevant du haut d’une colline un taureau qui s’apprête au combat dans la plaine, fond impétueusement sur lui : tel Turnus se précipite sur son ennemi. Déjà il est à la portée du javelot : Pallas impatient de voir si la fortune,