Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/595

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dans cette lutte inégale, secondera son audace, adresse cette prière au ciel : « Je t’en conjure, puissant Alcide, au nom de l’hospitalité que tu as trouvée chez mon père, au banquet où tu t’es assis quoique étranger, favorise mon généreux projet : que Turnus mourant me voie lui enlever ses armes sanglantes, et que ses derniers regards soient forcés de reconnaître son vainqueur ! » Alcide entendit le jeune guerrier, et, étouffant dans son cœur un profond gémissement, il verse des larmes inutiles. « Mon fils, lui dit avec bienveillance le père des dieux, les jours des mortels sont comptés, et le temps que dure leur vie est court, irréparable ; mais étendre sa renommée par ses hauts faits, voilà l’œuvre de la vertu. Combien d’enfants des dieux sont tombés sous les murs de Troie ! Sarpédon lui-même, mon fils, n’a-t-il pas péri ? Turnus aussi est appelé par son destin, et il touche aux bornes du temps marqué pour sa vie. » Il dit, et détourne les yeux des champs des Rutules.

Pallas cependant, d’un bras vigoureux, fait voler son javelot, et tire du fourreau son étincelante épée : le trait fend l’air, se fraie un passage à travers les bords du bouclier de Turnus, et effleure légèrement l’épaule du gigantesque guerrier : Turnus, sans s’étonner, et après avoir balancé quelque temps la longue javeline