Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/634

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accuse-moi de lâcheté, toi, Drancès, dont la valeur a entassé des monceaux de Troyens immolés par ton bras ; toi, dont les trophées décorent nos plaines ! Ce que peut un bouillant courage, veux-tu en faire l’épreuve sur l’heure ? nous n’irons pas loin chercher l’ennemi : il est là, à nos portes. Marchons à sa rencontre ! qui t’arrête ! Ta bravoure résidera-t-elle toujours dans ta langue habile aux vains discours et dans tes pieds si prompts à la fuite ? Moi vaincu ! Eh ! qui donc, misérable, peut, de bonne foi, m’accuser d’être vaincu, moi qui ai grossi le Tibre du sang des Troyens ; moi qui ai détruit d’un seul coup, dans son dernier rejeton, toute la postérité d’Évandre, et dépouillé les Arcadiens de leurs armes ! Tel ne m’ont point vu Bitias et le géant Pandarus, et ces milliers de Troyens qu’en un seul jour je précipitai dans le Tartare, quoiqu’enfermé dans leurs remparts et entouré de leurs retranchements. Point de salut dans la guerre, dis-tu ! Insensé ! C’est à Énée et à tes partisans qu’il faut tenir un pareil langage. Continue, en attendant, de semer ici le trouble et les alarmes, d’exalter les forces d’un peuple deux fois vaincu, et de rabaisser les armes des Latins. Que n’ajoutes-tu que les chefs des Myrmidons, que Diomède, Achille ont reculé devant les Troyens, et qu’à leur abord dans nos contrées, l’Aufide épouvanté a remonté vers sa