Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/657

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d’éviter une mort déplorable, ils expirent, percés de coups, sur le seuil des murs de la ville, devant les remparts de leur patrie, et devant l’asile même de leurs demeures. D’autres ferment les portes, refusent d’ouvrir un passage à leurs compagnons, et, malgré leurs prières, n’osent les recevoir dans les murailles. Alors commence un horrible carnage de ceux qui défendent l’entrée de la ville et de ceux qui se précipitent pour combattre. Exclus des remparts, sous les yeux de leurs parents en larmes, les uns roulent, entraînés par l’impétueux courant de la foule, dans les fossés escarpés ; les autres, dans leur aveugle fureur, lancent à toute bride leurs coursiers contre les portes, et cherchent à rompre, comme avec un bélier, ces barrières inébranlables. Les femmes elles-mêmes, dans ce combat suprême, excitées par un véritable amour de la patrie et par l’exemple de Camille, font pleuvoir, du haut des remparts, une grêle de traits ; et, quand le fer leur manque, elles lancent d’énormes troncs de chênes et des pieux durcis au feu ; elles courent et brûlent de mourir les premières pour la défense des murailles.

Cependant ces sinistres nouvelles parviennent jusqu’à Turnus, dans la forêt : Acca lui apprend l’horrible confusion qui règne partout : la destruction de l’armée des Volsques, la mort de Camille, la marche et le succès de l’ennemi furieux, devenu maître du champ de bataille, et la terreur qui déjà s’est emparée de la ville. Turnus, hors de lui, (ainsi l’exigent les ordres cruels de Ju-