Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/692

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bruit de ses yeuses frémissantes, et se réjouit en élevant dans les airs sa cime neigeuse.

Troyens, Rutules, Italiens, tous, à l’envi, tournent sur eux leurs regards : et ceux qui défendaient les remparts, et ceux qui ébranlaient avec le bélier le pied des murs, tous ont déchargé leurs épaules de leurs armes : Latinus lui-même voit avec étonnement ces deux héros, nés dans de différentes parties du monde, armés du glaive pour se mesurer et pour combattre.

Pour eux, dès qu’au milieu de la plaine un libre espace leur est ouvert, d’un soudain élan, après avoir de loin fait voler dans l’air leurs javelines, ils se précipitent l’un contre l’autre, et commencent la lutte en heurtant l’airain sonore de leurs boucliers : la terre en gémit. Alors, avec leurs épées, ils se portent des coups rapides et multipliés : le hasard et la bravoure se mêlent et se confondent. Ainsi, lorsque, dans la vaste forêt de Sila, ou sur le sommet du Taburne, deux taureaux furieux accourent au combat en heurtant leurs fronts ennemis, les pâtres effrayés s’éloignent, le troupeau s’arrête, muet de terreur, et les génisses attendent avec anxiété le résultat de la lutte qui doit assurer l’empire à l’un des deux, et donner un chef au troupeau. Les deux rivaux se servent de toutes leurs forces pour se faire d’horribles blessures ; ils se déchirent et se percent avec leurs cornes : un sang abondant inonde leurs cous et leurs épaules, et la forêt tout entière retentit