Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/206

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drons sûrement vous relever. — Je vous en réponds pour ce temps, colonel, reprit le major, si vous me laissez vingt-cinq bons soldats et des munitions, quand la faim devrait nous faire ronger la semelle de nos souliers ; mais j’espère que nous trouverons des provisions dans le pays. — Colonel Graham, si j’osais vous faire une demande, dit lady Marguerite, je vous supplierais de nous donner le sergent Francis Stuart pour commander les troupes auxiliaires que vous avez la bonté d’ajouter à notre garnison : cela lui donnera droit à un avancement : sa noble naissance m’engage à lui porter intérêt. — Les guerres du sergent sont finies, madame, dit Graham d’un ton calme, et il n’a plus besoin maintenant de l’avancement que peut offrir un maître terrestre. — Pardonnez-moi, » dit le major Bellenden en prenant Claverhouse par le bras, et en l’emmenant loin des dames, « mais je suis inquiet pour mes amis, je crains bien que vous n’ayez fait d’autres pertes plus importantes. Je remarque que l’étendard est porté par un autre officier que votre neveu. — Vous avez raison, major Bellenden, » répondit Claverhouse avec fermeté, « mon neveu n’est plus. Il est mort en faisant son devoir, ainsi qu’il convenait. — Grand Dieu ! s’écria le major, quel malheur !… ce jeune homme si beau, si brave, si plein de feu ! — Il était effectivement tout ce que vous dites, reprit Claverhouse ; le pauvre Richard était pour moi un fils, la prunelle de mes yeux, et mon héritier ; mais il est mort en faisant son devoir ; et moi… moi… major Bellenden, » ajouta-t-il en serrant fortement la main du major, « je vis pour le venger. — Colonel Graham, » dit le vétéran d’un ton affectueux, tandis que ses yeux se remplissaient de larmes, « je suis fort aise de vous voir supporter ce malheur avec tant de courage. — Je ne songe pas à moi seul, reprit Claverhouse, quoique puisse dire le monde ; je ne suis égoïste ni dans mes espérances, ni dans mes craintes, ni dans ma joie, ni dans mon chagrin. Je n’ai pas été sévère, avide, ambitieux dans mon intérêt personnel. Le service de mon maître et le bien de mon pays m’ont seuls guidé. J’ai peut-être poussé la sévérité jusqu’à la cruauté ; mais j’ai fait ce que je croyais le mieux, et maintenant je ne veux pas plus m’attendrir sur mes afflictions que je n’ai été sensible à celles des autres. — Je suis étonné du courage que vous montrez en de si pénibles circonstances, poursuivit le major. — Oui, reprit Claverhouse, mes ennemis dans le conseil rejetteront ce malheur sur moi… je méprise leurs accusations. Ils me