Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/225

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« Où allez-vous ? » lui dit ce dernier en lui saisissant le bras. — Je ne sais… peu m’importe… mais je ne resterai pas ici plus long-temps. — Es-tu si tôt fatigué, jeune homme ? reprit Burley ; tu as mis à peine la main à la charrue, et tu voudrais déjà l’abandonner ? Est-ce là ton attachement à la cause de ton père ? — Aucune cause, » dit Morton avec indignation, « aucune cause ne peut prospérer avec de tels défenseurs ! les uns se déclarent pour les rêves d’un fou altéré de sang ; un autre chef est un vieux pédant scolastique ; un troisième… » Il s’arrêta, et son compagnon, complétant sa pensée : « Est un assassin, un Balfour de Burley, voulais-tu dire ?… Mais je dois t’entendre sans colère… Pense donc, jeune homme, que ce ne sont pas des hommes d’un esprit froid et réfléchi qui se lèvent pour exécuter les jugements du ciel et accomplir la délivrance du peuple. Si tu avais vu les armées d’Angleterre pendant le parlement de 1640, lorsque leurs rangs étaient remplis de sectaires et d’enthousiastes plus féroces que les anabaptistes de Munster, tu aurais eu encore un plus grand sujet d’étonnement ; et cependant ces hommes étaient invincibles sur le champ de bataille, et leurs mains firent des prodiges pour la liberté du pays. — Mais leurs opérations étaient dirigées avec sagesse, répondit Morton, et la violence de leur zèle s’exhalait tout entière dans leurs exhortations et leurs sermons, sans produire de division dans leurs conseils ou les pousser à la cruauté. J’ai souvent entendu mon père assurer que rien ne l’étonnait plus que le contraste de l’extravagance de leurs opinions religieuses avec la sagesse et la modération de leur conduite dans les affaires civiles et militaires. Vos conseils, au contraire, ressemblent à un véritable chaos. — Il faut prendre patience, jeune homme, reprit Burley, et ne pas abandonner la cause de ta religion et de ton pays, pour un mot déraisonnable ou une action extravagante. Écoute-moi, j’ai déjà fait comprendre aux plus sages de nos amis que notre conseil est trop nombreux, et qu’en le maintenant ainsi nous ne pouvons espérer de voir les Madianites tomber entre nos mains. Ils ont entendu ma voix, et nos assemblées seront bientôt réduites à un assez petit nombre de membres pour pouvoir délibérer et agir avec ensemble. Tu y auras ta voix, aussi bien pour diriger nos opérations militaires que pour protéger ceux qu’on devra épargner. Es-tu satisfait ? — Je serai charmé sans doute, répondit Morton, de pouvoir adoucir les horreurs de la guerre civile, et je n’abandonnerai pas le poste que j’ai accepté, à moins que je ne