Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/40

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il était de cette classe à laquelle les grands peuvent marquer des égards sans déroger, quatre des amis du duc, avec cet empressement que le pauvre Malvolio attribue à son cortège imaginaire, parvinrent à amener le vainqueur en présence de sa Seigneurie. Comme on le conduisait en triomphe à travers la foule des spectateurs qui l’accablaient de leurs félicitations, il vint à passer, ou plutôt il se trouva vis-à-vis de Marguerite et de sa petite-fille. Le capitaine du Perroquet et miss Bellenden rougirent, et la jeune fille répondit avec quelque embarras au salut profond que lui faisait en passant le vainqueur. — Vous connaissez donc ce jeune homme ? dit lady Marguerite, — Je… je l’ai vu chez mon oncle, madame, et ailleurs quelquefois, » dit tout bas miss Édith Bellenden. — J’entends dire autour de moi, reprit lady Marguerite, que ce jeune damoiseau est le neveu du vieux Milnwood. — Le fils de feu le colonel Morton de Milnwood, qui se distingua à la tête d’un régiment de cavalerie à Dunbar et à Inverkeithing, » dit un gentilhomme qui se trouvait à cheval près de lady Marguerite. — Oui, et qui, avant cela, avait combattu pour les presbytériens à Marston-Moor et à Philiphaugh, » ajouta lady Marguerite ; et elle soupira en prononçant ces fatales paroles, qui lui rappelaient le souvenir triste et cruel de la mort de son époux. — La mémoire de Votre Seigneurie est fidèle, dit le gentilhomme ; mais il serait plus convenable maintenant d’oublier tout cela. — Il devrait ne pas l’oublier, lui, Gilbertscleugh, répliqua lady Marguerite, et se dispenser de s’introduire dans la compagnie de ceux à qui son nom doit rappeler de pénibles souvenirs. — Vous oubliez, ma chère dame, dit l’interlocuteur, que ce jeune homme vient ici au nom de son oncle, pour acquitter l’obligation à lui imposée. Il serait à désirer que tous les districts du comté fournissent des sujets qui lui ressemblassent. — Son oncle, dit lady Marguerite, est un puritain, tout aussi bien que son vieux père, je suppose ? — Son oncle est un vieil avare, dit Gilbertscleugh, dont les opinions ne sont point à l’épreuve d’une pièce d’or ; et, quoiqu’un peu à contrecœur sans doute, il aura, pour éviter une amende, envoyé le jeune homme à la revue. D’ailleurs je suppose que ce pauvre garçon doit se trouver heureux d’avoir pu se dérober pour un jour à l’insipidité et à l’ennui du vieux château de Milnwood, où il ne voit d’autres personnes qu’un oncle hypocondre et une ménagère favorite. — Savez-vous combien d’hommes et de chevaux le domaine de Milnwood doit fournir ? » dit la vieille dame, donnant