Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/46

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L’objet de la visite du bénédictin dans le pays de ses ancêtres se trouvant ainsi rempli, il nous fit part de l’intention où il était de nous quitter de bonne heure le jour suivant, et m’invita en même temps à venir déjeuner avec lui avant son départ. Je m’y rendis en effet, et lorsque nous fûmes levés de table, l’étranger me prit à l’écart, et tirant de sa poche un gros paquet de papiers, me le remit entre les mains. « Voici, capitaine Clutterbuck, me dit-il, des mémoires authentiques du seizième siècle, qui présentent sous un point de vue singulier, et, à ce que je crois, intéressant, les mœurs de cette époque. Je suis porté à croire que ce ne sera pas un présent désagréable au public anglais, et je vous abandonne volontiers tous les profits qui pourront résulter de leur impression. »

Je le regardai avec surprise en l’entendant parler ainsi, et lui fis observer que l’écriture paraissait trop moderne pour l’époque qu’il assignait à son manuscrit.

« Vous vous méprenez, monsieur, me répondit le bénédictin ; je n’ai pas voulu dire que ces mémoires eussent été composés dans le seizième siècle, mais seulement qu’ils ont été rédigés sur des matériaux authentiques de cette époque, et écrits dans le goût et le langage des temps modernes. Mon oncle a commencé cet ouvrage, et c’est moi qui, en partie pour me perfectionner dans la pratique de la langue anglaise, et en partie pour me distraire dans mes heures de mélancolie, l’ai continué et terminé.

« Vous verrez l’endroit du manuscrit où mon oncle a interrompu sa narration, et où j’ai commencé la mienne. Au fait ces deux parties ont rapport à des personnages et à des époques différentes. »

Tout en gardant les papiers mis entre mes mains, je lui exprimai quelques doutes : pouvais-je, comme bon protestant, entreprendre ou diriger la publication d’un ouvrage écrit probablement dans l’esprit du papisme ?

« Vous ne trouverez dans ces feuilles, me dit-il, aucune question de controverse ni aucun sentiment que les honnêtes gens de toutes les opinions ne soient, je pense, disposés à adopter. Je n’ai pas oublié que j’écrivais pour une nation malheureusement séparée de la foi catholique, et j’ai soin de ne rien dire dont l’interprétation exacte puisse donner lieu à une accusation de partialité de ma part. Cependant, si en collationnant ma narration avec