Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/94

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— Terrible en effet ! » dit la comtesse en palissant.

« Vous n’êtes pas à l’aise, mon amour, » dit le comte en la soutenant dans ses bras ; « remettez-vous au lit, vous l’avez quitté de trop bonne heure. Avez-vous quelque autre chose à me demander qui ne compromette ni ma réputation, ni ma fortune, ni ma vie ?

— Rien, milord, rien, mon amour, » répondit la comtesse d’une voix faible ; « j’avais quelque chose à vous dire, mais votre emportement me l’a fait oublier.

— Réserve cela pour notre prochaine entrevue, » dit le comte avec tendresse en l’embrassant de nouveau ; « et à l’exception de ces demandes que je ne puis et n’ose t’accorder, il faudra que tes désirs surpassent tout ce que peut produire l’Angleterre et ses dépendances, pour qu’ils ne soient pas accomplis à la lettre. »

En disant ces mots, il lui fit ses adieux définitifs. Au bas de l’escalier il prit des mains de Varney un ample manteau de livrée et un chapeau à larges bords, dont il se couvrit pour se déguiser et cacher entièrement sa figure. Des chevaux pour lui et Varney l’attendaient dans la cour. Quant aux deux ou trois personnes de sa suite, qui connaissaient le secret tout juste assez pour savoir ou soupçonner que le comte avait dans cette maison un rendez-vous avec une belle dame dont ils ignoraient le nom, on les avait fait partir pendant la nuit.

Foster lui-même tenait la bride du coursier peu élégant mais vigoureux, et excellent pour la route, qui devait emmener le comte, tandis que son vieux domestique gardait le cheval plus fin et plus richement harnaché que Richard Varney devait monter en sa qualité de maître.

Comme le comte approchait, Varney s’avança pour présenter la bride à son maître et pour empêcher Foster de remplir cette fonction, qu’il considérait probablement comme un des privilèges de sa charge. Foster parut mécontent de ce qu’on s’interposait ainsi entre son maître et lui, comme pour l’empêcher de lui faire sa cour ; pourtant il céda la place à Varney. Le comte monta à cheval sans dire mot, et, oubliant que son rôle de domestique lui commandait de rester en arrière de son maître supposé, il sortit de la cour d’un air préoccupé, non sans répondre de la main aux signes que la comtesse lui faisait avec son mouchoir d’une des fenêtres de son appartement.

Tandis que ses formes majestueuses s’évanouissaient sous la sombre voûte qui conduisait hors de la cour, Varney dit entre ses dents :