Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/31

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et souvent inhabitées, et les ruines d’anciennes forteresses norses qui deviennent plus sombres, vues au faible jour d’un hiver au pôle arctique. Pour Mordaunt, qui avait un caractère passablement romanesque, ces superstitions formaient un agréable et intéressant exercice d’imagination, tandis qu’à moitié doutant, à moitié porté à croire, il écoutait les contes qu’on lui chantait sur ces merveilles de la nature, créations d’une foi crédule, dans la langue rude, mais énergique, des anciens Scaldes.

Mais on ne manquait point dans le pays d’amusements moins sauvages et plus convenables à l’âge de Mordaunt que les contes bizarres et les exercices violents que nous avons déjà mentionnés. La saison de l’hiver où, vu la brièveté des jours, le travail devient impossible, est dans les îles Shetland une époque de fêtes, de réjouissances et de divertissements. Tout ce que le pêcheur a pu amasser pendant l’été est employé pour entretenir la joie et l’hospitalité de son foyer durant cette saison ; tandis que les propriétaires et les seigneurs de l’île donnent une carrière plus large encore à leurs dispositions conviviales, encombrent leurs maisons d’hôtes, et oublient la rigueur du temps à force de plaisanteries, de joie, de chansons, de danses et de toasts.

Parmi les divertissements de cette joyeuse saison, aucun jeune homme n’apportait plus d’ardeur à la danse, plus de gaité aux amusements que le jeune étranger Mondaunt Mertoun. Quand l’état d’esprit de son père permettait ou plutôt nécessitait son absence, il allait de maison eu maison, hôte bienvenu partout où il entrait, et prêtait volontiers sa voix à la chanson, ses pieds à la danse. Une barque, ou si le temps, comme il arrivait souvent, ne lui accordait pas cette commodité, un des nombreux bidets qui, paissant par troupeaux au milieu des immenses marais, étaient pour ainsi dire aux ordres de tout le monde, le transportait de l’habitation d’un Shetlandais hospitalier à celle d’un autre. Personne ne le surpassait à exécuter la danse guerrière des épées, espèce d’amusement dont l’origine remonte aux habitudes des anciens Norses. Il savait jouer sur le gûe et sur le violon ordinaire les tristes et pathétiques accords particuliers au pays ; et par la vivacité de son exécution, il savait obvier à leur monotonie en les mêlant avec les airs plus gais du nord de l’Écosse. Quand on formait une partie de masques, ou, comme on dit en Écosse, de guizards, pour visiter un laird voisin, ou un riche udaller, on augurait bien de l’expédition si Mordaunt Mertoun voulait bien consentir à se charger du rôle de