Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/169

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pagnie en Bourgogne. — Si nos intérêts respect ne nous permettent de faire route ensemble, digne landamman, répondit le marchand, je m’estimerai très heureux de redevenir votre compagnon de voyage… Maintenant livrez-vous de nouveau au sommeil que j’ai interrompu. — Dieu vous bénisse, bon et digne homme ! » dit le landamman se levant et embrassant l’Anglais, — « dussions-nous ne jamais nous revoir, je n’oublierai pas de ma vie le marchand qui négligea ses propres intérêts pour suivre le chemin de la sagesse et de la droiture. Je ne connais personne qui n’eût risqué d’ensanglanter tout un lac pour sauver cinq onces d’or… Adieu, vous aussi, brave jeune homme : vous avez appris parmi nous à tenir votre pied ferme sur le bord d’un précipice helvétien ; mais nul ne peut vous enseigner aussi bien que votre père à suivre une droite route au milieu des marais et des précipices de la vie humaine. »

Il embrassa alors ses amis, leur fit chaudement ses adieux, et fut imité, comme d’ordinaire, par son collègue de Schwitz, qui promena sa longue barbe blanche sur les deux joues du père et du fils, et les invita encore à se servir de sa mule. Tous ensuite s’arrangèrent pour reposer encore, et dormir jusqu’à l’apparition de l’aurore d’automne.

CHAPITRE XIII.

LE GOUVERNEUR.

L’inimitié et la colère sont récemment entrées dans l’esprit de votre duc soi-disant offensé ; il sévit contre les marchands, nos honnêtes concitoyens, qui, manquant d’or pour racheter leur vie, ont scellé de leur sang ses rigoureuses lois.
Shakspeare, Comédie des Erreurs.

L’aurore commençait à peine à dominer l’horizon lointain qu’Arthur Philipson était sur pied, préparant tout pour le départ de son père et le sien, qui, suivant les conventions de la nuit précédente, devait avoir lieu deux heures avant celle où le landamman et sa suite se proposaient de quitter le château ruiné de Graff’s-Lust. Il ne lui fut pas difficile de séparer les paquets soigneusement arrangés qui contenaient les effets de son père, des malles grossières dans lesquelles était renfermé le bagage des Suisses. Les uns étaient confectionnés avec l’attention de gens accoutumés à de longs et périlleux voyages, les autres avec la simple insouciance de ceux