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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/121

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tendu tirer en dedans le verrou qui avait été mis à sa requête par sœur Ursule ; car la jeunesse d’Augustin, son extrême beauté, ou plutôt ses souffrances et sa tristesse lui avaient concilié les affections de la sœur.

Aussitôt donc que le malheureux Augustin fut rentré dans sa chambre, il s’entendit saluer à voix basse par la bonne religieuse. Pendant son absence, elle s’était glissée dans la cellule et cachée derrière le petit lit qui s’y trouvait. Elle s’avança vers le jeune homme en lui témoignant vivement la joie qu’elle éprouvait de son retour. Une infinité de petites attentions, des branches de buis et d’autres arbres toujours verts, seuls ornements de la triste saison, montraient le soin de ces saintes femmes à décorer la cellule de leur hôte, Les félicitations de la sœur Ursule témoignèrent de l’intérêt qu’on prenait à son sort ; et tout indiquait en même temps que la religieuse possédait en partie le secret de l’étranger.

Tandis que le jeune Augustin et la sœur s’entretenaient ainsi avec confiance, la différence extraordinaire de leurs figures et de leur extérieur aurait vivement frappé quiconque serait devenu témoin de leur entrevue. La robe noire de pèlerin que portait la femme déguisée ne formait pas un contraste plus frappant avec le costume de laine blanche porté par la religieuse de Sainte-Brigitte, que le visage de la nonne, sillonné de plusieurs horribles cicatrices, et privé d’un œil, avec la belle physionomie d’Augustin, dont les regards se portaient avec un air de confiance et même d’affection sur les traits étranges de sa compagne.

« Vous connaissez, dit le prétendu Augustin, la principale partie de mon histoire ; pouvez-vous et voulez-vous me prêter secours ? sinon je mourrai, ma chère sœur, plutôt que d’encourir la honte. Non, sœur Ursule, je ne serai point désignée par le doigt du mépris, comme la fille imprudente qui a tout sacrifié pour un homme dont l’attachement ne lui était pas assez prouvé. Je ne me laisserai pas traîner devant de Wallon, pour être forcée en sa présence, par la crainte de la torture, à m’avouer pour la femme en l’honneur de laquelle il défend le Château Dangereux. Sans doute il s’estimerait heureux d’unir sa main à celle d’une damoiselle dont la dot est si considérable ; mais qui peut dire s’il me traiterait avec ce respect que toute femme doit désirer, ou s’il me pardonnerait la hardiesse dont je me suis rendue coupable, lors même que les conséquences lui eussent été favorables. — Allons, ma fille, répondit la nonne, consolez-vous ; tout ce que je pourrai faire pour vous aider,